Dans la salle froide du tribunal,
Elle s’élève, fragile, mais digne, face au mal,
Les mots qu’elle prononce, tremblants, blessés,
Portent l’écho des nuits où elle ne faisait que pleurer.
Les regards se croisent, certains compatissent,
D’autres jugent, indifférents, ou même complices,
Mais elle parle, malgré la gorge nouée,
Une plainte déposée pour enfin s’exhumer.
Le juge écoute, les avocats plaident,
La vérité danse, fragile, dans cette aide,
Une lumière semble percer l’obscurité,
Peut-être, enfin, justice sera rendue, pensait-elle.
Mais quand la journée s’éteint, que le procès s’efface,
Elle rentre chez elle, dans ce vide qui l’enlace,
La clé tourne dans la serrure usée,
La porte se ferme sur des souvenirs glacés.
Ce n’est pas seulement du métal qui s’enclenche,
C’est un seuil invisible, un gouffre qui s’ouvre,
Loin du tribunal, des robes noires et des mots,
Elle fait face à un juge plus impitoyable encore :
Sa propre mémoire, sa conscience omniprésente,
Des échos d’ombres et de douleurs latentes,
Les murs blancs deviennent des écrans vivants,
Projets de spectres, souvenirs oppressants.
Chaque objet dans la pièce semble chargé d’un poids,
Une tasse, une chaise, une photo sur le bois,
Tout murmure un passé qu’elle cherche à éteindre,
Mais la vie a laissé des empreintes qu’on ne peut feindre.
Alors, dans le silence, le vide hurle,
Un cri intérieur qui l’épuise et la brûle,
Elle s’effondre sur ce lit, témoin des nuits noires,
Où les cauchemars tissaient leur voile illusoire.
Le tribunal promettait une justice rationnelle,
Mais qui juge les cauchemars ? Qui apaise l’éternel ?
La plainte déposée était un cri vers la lumière,
Mais l’ombre persiste, tenace, en arrière.
Elle se demande : qu’est-ce que le mal ?
Est-ce l’acte subi, ou l’empreinte qu’il installe ?
Est-ce la violence visible, ou celle qui s’incruste,
Dans les méandres de l’âme, en racines robustes ?
Derrière la porte, il n’y a ni loi ni armée,
Seulement un esprit blessé cherchant à respirer,
L’ennemi n’est plus le bourreau désigné,
C’est le doute, la peur, le souvenir incrusté.
Pourtant, une question s’élève doucement,
Comme une lueur vacillante dans le tourment :
Si la douleur persiste, peut-elle être domptée ?
Si la porte se ferme, peut-elle s’ouvrir à la clarté ?
Elle serre son courage comme une arme de verre,
Un bouclier fragile contre le désert,
Sa respiration alors, lente, profonde, tremblante,
Cherchant dans ce vide une vérité latente.
Philosopher, c’est affronter l’obscur,
C’est chercher un sens, même dans les blessures,
Et même si, dans l’ombre, elle se sent brisée,
Chaque pas en avant est une victoire arrachée.
Un jour, elle le sait, ce fardeau s’allégera,
Chaque soir un peu plus, chaque pas plus assuré,
Derrière cette barrière, une autre s’ouvrira,
Sur un horizon qu’elle seule aura créé.
Ecrivain77 / Christophe R