Ce n’est pas l’épreuve qui forge la peur,
Le regard qu’on lui donne, lourd d’erreur.
Nous marchons, non pour un trône ou un nom,
Vers ce face-à-face avec ce que nous sommes.
Le concours, miroir sans mémoire,
Reflète un espoir, fragile et passager.
On gravit la falaise, une feuille pour épée,
Le cœur battant, le calme à dompter.
Tout en haut, un seuil sans visage,
Dans chaque page, le poids d’une passion.
Les regards se croisent, les souffles s’arrêtent,
On avance dans un rêve vers l’heure secrète.
Le temps s’étire, funambule étrange,
La solitude interroge, la pensée vacille.
Entre ces murs blancs, le moi chancelle,
Suis-je ici pour répondre ou obéir docile ?
Chaque ligne tracée, fût-elle imparfaite,
Est une vérité que nul barème n’arrête.
Les secondes glissent, sablier brûlant,
Le geste tremble, le souffle latent.
La sueur perle, le dos se tend,
L’on écrit en soi, ligne après battement.
Le stylo une arme, le souffle une flamme,
Le corps se fait prière au milieu du vacarme.
Le verdict viendra, drapé d’un chiffre nu,
Il ne dira rien de ce qui fut vécu.
Les jurys croient trier, séparer, nommer,
Ils oublient que l’essentiel ne peut se classer.
Un esprit sincère vaut plus qu’un palmarès,
La quête de sens, plus que la justesse.
On rend sa copie, on rend son coeur,
Sans savoir si c’est offrande ou douleur.
Derrière une porte, l’arbitraire s’agite,
“Trop ceci.” “Pas assez cela.”
Un chiffre, un mot, une logique figée,
Le rêve se plie dans un coin de drap.
Le doute s’insinue, léger tel un poison.
Soudain, un éclat, une idée, une voix.
Un mot qui respire, une étoile en soi.
Tout s’aligne, l’instant devient raison.
Il reste la force d’avoir tenté,
Si rien ne vient la souligner.
Ce qu’on gagne ici n’a pas de médaille,
Juste une braise de plus sous ma muraille.
On ne vaut pas ce qu’on nous accorde,
Ce qu’on poursuit en silence, quand la nuit mord.
Sans récompense, ni bruit, ni décor,
Reste un feu qui ne demande aucun accord.
Christophe R / Ecrivain77